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Rockfanch

Un vendredi au Festival du Roi Arthur avec Louis Bertignac et les Wampas

Publié le 30 Août 2015 par Julien in Chroniques concerts

Alors que la pluie avait exceptionnellement pris ses quartiers en Bretagne depuis quelques jours, le soleil fit enfin son apparition vendredi matin dans la région rennaise. Peut-être un enchantement de la bande à Merlin qui est l’attraction du week-end à Bréal-sous-Monfort, pour la sixième édition du festival du Roi Arthur. Après quelques bouchons bien mérités, et donc un peu de retard, la fête peut commencer avec le concert de Louis Bertignac.

 

Sans prétention, fidèle à lui-même, l’ancien guitariste de Téléphone commence son set par « un petit rock n’roll » et ne trompe pas son public. Les premières notes annoncent la couleur : la rythmique est lourde et puissante. Le batteur Eric Lebailly a beau avoir écrit « Je t’aime » sur sa grosse caisse, il ne fait pas dans la délicatesse et avec Marco Bravin à la basse, le moins que l’on puisse dire, c’est que ça envoie. À la guitare, Louis n’est plus tout seul. Il s’est adjoint les services de Nico Bravin, grand frère du bassiste, qui tient la rythmique. Le son est brut, très rock n’roll. Les trois premières chansons sont des extraits du dernier album « Suis-moi » sorti il y a un an. Le set commence par Qui a vu ma guitare ? , même si on sait bien que Bertignac ne l’a jamais vraiment perdue. Elle est en effet toujours là, cette mythique Les Paul junior 1963. Jack coudée, rafistolée d’un peu partout, elle sonne pourtant toujours autant, même si Loulou ne la fait pas autant pleurer que sur la dernière tournée. Les chansons s’enchaînent, Confidences de ma junior, Suis-moi puis Je joue, sur un tempo plus rapide que l’original qui ne le dénature pas, c’est le principal. Pendant Bientôt les clones, le patron laisse le solo à son guitariste. En ce début de concert, Louis donne l’impression qu’il n’est plus vraiment adepte des chorus interminables qui faisaient pourtant son charme. Pour preuve, il ne jouera pas pendant le set son efficace Vas-y guitare, cette ode à sa meilleure amie dont le cortège de riff assassins a fait pleurer plus d’une six cordes. Tant pis. La première partie du show se termine quand même par un signe qui ne trompe pas : Bertignac enchaîne quelques notes de The wind cries Mary de Jimi Hendrix, mine de rien, sans avoir l’air d’y toucher.

 

On sent que les tubes le démangent et quand il propose « une petite vieille ? », on entend déjà résonner les première notes de Cendrillon. Les lumières étonnamment très kitch et multicolores ne mettent pas vraiment en valeur le morceau, mais pour beaucoup la magie opère quand même. Et quand le batteur lance, une seule fois certes mais une fois quand même, sa baguette en l’air comme le fait Kolinka toutes les dix secondes, on s’y croirait presque. Les voix ne sont pas très bien calées, ça ne chante parfois pas vraiment, c’est le style Bertignac : moins pointilleux, mais presque plus touchant et humain que son copain Aubert. Au milieu du morceau, les musiciens se font un petit plaisir en reprenant So Lonely de The Police qui ne laisse pas le public indifférent. Et quand le morceau se termine, Bertignac lance une phrase qui achève sa conquête de l’auditoire : « J’vais pas faire comme si c’était mon premier concert mais ça fait quelque chose ». Petite pause. Là où d’autres ont des médiators sur leur pied de micro, lui y accroche sa cigarette électronique et vapote, le sourire aux lèvres. On repart, les tubes de Téléphone s’enchaînent. New-York avec toi, toujours dans une version très brute, avant que Bertignac ne lâche une Bombe humaine : « C’est à la mode Téléphone » dit-il au public « y’a des trucs qui se disent et il va se passer des choses... ». Après un ultime détour par la case dernier album avec le titre Embrasse moi, Loulou joue au karaoké en laissant le public chanter seul les premières paroles de Ça c’est vraiment toi, Ces idées là et Un autre monde. On ne peut que s’incliner devant l’humilité du personnage qui s’adresse au public en des mots très touchants : « Vous m’apportez beaucoup de bonheur, je vous dois à peu près tout ce que j’ai. » Simple, sans artifice, brut et touchant, Louis Bertignac s’en va comme il est arrivé, secouant une dernière fois sa tignasse blanche avant de quitter la scène sans dire au revoir, parce qu’il dit être trop timide pour cela.

Ce n’est pas pour déplaire à Didier Wampas qui est pendant ce temps là intenable sur la petite scène. Depuis quelques minutes, et alors que Bertignac n’a pas fini son concert, il apparait par intermittence devant son public, bandana sur la tête, chemise, blouson de cuir et...caleçon. Dans un tout autre genre, là non plus il n’y aura pas d’artifices. Didier est à la maison, comme un lion en cage. Il veut jouer et le fait savoir : la fin du set de l’ancien guitariste de Téléphone le gonfle. Le solo d’Un autre monde, il n’en a rien à foutre, ce qu’il veut, c’est faire découvrir à tous ceux qui ne connaissent pas encore le phénomène sa planète déjantée. Comme d’habitude, personne ne sera déçu du voyage. Il faut quand même attendre Comme un punk en hiver, Je voudrais et Les ravers de Spézet, soit pas moins de trois morceaux avant que l’animal ne descende enfin dans la foule, pour un excentrique Yeah Yeah qui marque pour son teneur de câble de micro le début d’une très longue soirée. Didier ne tient pas en place. C’est l’amour, Marfa, il slame sans arrêt et les plus téméraires, de ceux qui s’approchent sans craindre un coup de micro, chantent avec lui. Duos éphémères et totalement déjantés, ça crie, ça hurle : les Wampas sont dans la place. En dédiant Rimini à Richard Virenque, Didier nous rappelle sa passion pour le vélo et commence le morceau seul à capella, rejoint par le public qui le connait par cœur.

 

Ce n’est pas un chanteur qui est sur scène, c’est un petit cabri, qui saute un peu partout, un punk déjanté, qui hurle dans son micro plusieurs secondes après la fin des morceaux, un éternel adolescent qui ne triche pas avec son amour du rock n’roll. Didier tombe le blouson pour Manu chao. Monté sur une fly, il n’a pas peur « de la dette grecque » et quand vient enfin le moment de chanter Les bottes rouges, il tente son inoxydable portée par le public dans une chaise. Entonnant un air bien connu des autochtones, Tri martelod pour ne pas le citer, Didier demande très poliment si la « bande de chiens galeux » que constituent les premiers rangs va réussir à hisser le roi sur son trône. « Bande d’animaux, pas les poils ! » demande-t-il en rigolant. De retour sur scène, il s’est fait piquer son bandana mais ce n’est pas bien grave, l’heure de l’instant émotion est arrivé. Didier a fait venir une petite fille sur la scène, à qui il demande ce qu’il peut bien se passer ce soir... « Ce soir c’est Noël ! » répond-elle en connaisseuse. La petite Lisa qui danse du haut de ses 1m40 et Didier qui court partout sur la scène : et si c’était pas exactement ça le rock n’roll ? Infatigable, le chanteur semble même rajeunir à chaque concert.

 

Et quand il nous dit que ce n’est pas lui qui est trop vieux mais que certaines musiques sont « vraiment de la merde », on ne peut qu’être d’accord avec lui. On regrette tout de même par moments que Philippe Almosnino, l’ancien guitariste qui a visiblement quitté le groupe, ne soit plus de la partie, ça sonnait quand même un peu mieux. Pourquoi Eric Starczan, qui l’a récemment remplacé, n’utilise-t-il pas tout son potentiel ? Mystère. Enfin, ne faisons pas la fine bouche, tant que Didier est là, on ne peut pas vraiment se plaindre...Visiblement, le concert est d’ailleurs sensé se terminer, mais le chanteur ne s’en préoccupe pas : « Allez on fait Petite fille on s’en branle ! ». Pour les habitués, c’est un passage obligé, mais les videurs ne doivent pas souvent avoir vu les Wampas en concert : ils ne laissent pas monter les filles sur la scène ! Arrivé à ses fins, l’idole finit debout sur une fly case, en posture christique, avant de se laisser tomber dans les bras de ces demoiselles et de s’offrir un dernier slam qui ne sera sans doute pas le plus désagréable de sa soirée. En vrai gentleman, il embrasse une par une toutes les prétendantes et les laisse repartir dans la fosse, chacune pouvant rapporter sa petite pincée d’étoiles au camping. Un dernier couplet de Stivell, pour rigoler parce qu’on est en Bretagne, et Didier sort de scène. L’histoire ne dit pas s’il a fini par retrouver son pantalon.

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